Photo by Maxim Fiyavchuk on Unsplash |
Aujourd'hui j'ai écouté un disque bouleversant. C'est le dernier album d'Arman Méliès intitulé Laurel Canyon. Tout dans ce disque m'émeut : les paroles finement ciselées, les musiques d'une puissance incroyable.. Méliès a cette capacité à créer de la tension, à faire monter les crescendos avec flamboyance, ça m'impressionne. Il y a aussi les arrangements qui mettent en valeur de sublimes guitares, et une cohérence artistique tout au long de l'album qui vous embarque pour un voyage épique en Californie : on y croise les fantômes de de la conquête de l'Ouest partis découvrir un nouvel Eldorado, on se perd dans ces grands espaces inconnus, on est écrasé par le soleil du désert.
Je me sens tout petit après avoir écouté ces quelques titres, mais aussi plein d'espoir et d'enthousiasme, plein d'une envie de créer (en toute modestie), d'inventer, de m'y coller (pour le dire de façon prosaïque) !
C'est drôle, j'ai eu l'impression que le premier confinement avait révélé les artistes qui sommeillaient en nous. J'ai lu des textes, écouté des chansons, vu des vidéos drôles et créatives. Puis plus rien. Comme si tous ces gens avaient oublié leurs belles promesses de "monde d'après". Pour ma part, j'ai très peu produit pendant le confinement (une ou deux chansons), tenaillé par l'angoisse, incapable de me projeter dans un après, tellement à l'affut des contaminations, des hospitalisations. J'ai très peu lu, mais j'ai commencé pas mal de romans. J'étais incapable de m'accrocher à une intrigue, mon esprit n'était pas là. En revanche j'avais mon smartphone toujours en main, à scroller sans fin sur Facebook ou Instagram. Que de temps perdu !
J'admirais tous ces gens capables de faire éclore quelque chose de leur imaginaire dans une période si anxiogène. Ils m'ont déçu, si vite revenus à leurs vies d'avant. J'ai pour principe d'éviter de promettre, c'est potentiellement dangereux, c'est cruel de faire naitre un espoir et de le décevoir.
Depuis cette drôle de période, je gratouille, je griffonne, je gribouille, j'écrivaille même ! Mais comment expliquer que je n'aille jamais au fond des choses, pourquoi toujours rester en surface ? Si je le savais.. J'aime les croquis, je ne colore jamais, en musique je me cache derrière une esthétique snobinarde Lo-Fi pour justifier mes morceaux bancals et jamais achevés, j'écris à nouveau, mais je rechigne à revenir sur mes textes.. Je suis un adolescent qui commence et ne finit jamais rien.
Il y a quelques semaines, j'ai suivi un atelier d'écriture. C'était très bien, j'ai pu mesurer le travail que demande le fait d'écrire. Certaines personnes aguerries à l'exercice ont réussi à produire des textes imaginatifs, des textes convoquant des images fortes, des textes jouant avec les mots. Pour ma part je suis resté avec mes fictions minuscules. Il fallait travailler sur le thème des sensations. A la découverte de l'exercice j'ai blêmi. Comment mettre des mots derrière des sensations ? C'est selon moi ce qu'il y a de plus complexe au monde, trouver le mot juste, l'image juste, éviter le cliché, ne pas tomber dans le ridicule. Et même si je me sentais en sécurité avec les autres participants et l'animatrice, je me suis censuré, par peur de me dévoiler (ne serait-ce qu'un chouïa). Foutu comportement qu'on nous inculque dès le plus jeune âge ! "Sois poli, sois sage, ne fais pas de bruit." Notre éducation a dû brimer plus d'un artiste en herbe.. Malgré tout, et pour revenir aux sensations, suite à l'atelier j'ai tenté de décrire un visage, ce que je ressentais en le regardant, et ce que ce personnage pouvait ressentir avec le plus d'acuité possible; Echec cuisant, papier déchiré, rires moqueurs du censeur, et un léger sentiment de honte rétrospective en repensant à ce texte trop naïf, peut-être même niais.
Tant pis, il faut persévérer, un jour (peut-être) je saurai transcrire les sensations multiples et infinies que me procurent cette vie.
Commentaires